La mode torture, abuse, tue travailleurs et travailleuses de l'industrie textile et bijoutière

La mode torture, abuse, tue travailleurs et travailleuses de l'industrie textile et bijoutière

Des salaires de 90 € par mois pour environ 70 heures de travail par semaine au Bangladesh et de 24 € par mois en Éthiopie

Plus de la moitié des vêtements portés par les européens sont confectionnés au Bangladesh : 59% des exportations textiles du marché européen en proviennent. C'est le second exportateur textile au monde derrière la Chine avec 84 % des revenus à l'export générés par l'industrie textile. Le secteur de l'habillement représente ainsi 17 % du PIB du Bangladesh. Les travailleurs y gagnent 32 centimes de l'heure, ce qui équivaut à près de 30 fois moins par heure qu'un français gagnant le salaire minimum net (9,12 €, SMIC). Cela représente 95 $ par mois soit 90 € par mois pour 281,25 heures de travail par mois, soit 15 fois moins qu'un français gagnant le salaire minimum net (1383,09 €, SMIC) pour 151,67 heures par mois. Les bangladais travaillent pour ce salaire de 90 € par mois environ 70 heures par semaine. D'autres sources d'information affirment qu'au Bangladesh et en Inde, les ouvriers de l'industrie textile travaillent 14 à 16 heures par jour pour 30 centimes de l'heure.
"La question que l'on peut ici se poser est : travaillerions-nous 70 heures par mois pour un salaire de 209,55 €, équivalent à celui des bangladais qui travaillent dans l'industrie du textile et proportionnel au coût de la vie en France ?"
Le prix des biens de consommation courante au Bangladesh étant inférieur de 57 %, soit 2,33, à la France, le salaire des bangladais dans l'industrie du textile, 15 fois inférieur à celui d'un salaire minimum en France malgré 129,58 heures travaillées mensuellement de plus au Bangladesh, devrait donc être de 594 €. Donc, si les bangladais travaillant dans l'industrie textile devaient être payés tels que des français rémunérés au SMIC et par rapport au coût de la vie de leur pays, sans prendre en compte de limites relatives aux horaires, leur salaire devrait être multiplié par 6,6. La question que l'on peut ici se poser est : travaillerions-nous 70 heures par mois pour un salaire de 209,55 €, équivalent à celui des bangladais qui travaillent dans l'industrie du textile et proportionnel au coût de la vie en France ? Pour 35 heures de travail mensuel, nous serions alors rémunérés 104,77 €.

Les travailleurs éthiopiens seraient eux les moins payés au monde, avec un salaire mensuel de 26 $ par mois soit environ 24 €. En 2019, le média Le Monde évoquait ce fléau en précisant que les exportations de produits textiles fabriqués par l'Éthiopie s'élevaient à 145 millions de dollars par an. En 2022, l’agence éthiopienne de presse citait Melaku Lebel, Ministre de l’Industrie et du Commerce de l'Éthiopie en rapportant que les autorités projettaient des recettes à l’export de 250 millions de $ grâce à la vente de produits textiles sur le marché international en 2022 - 2023. Le montant annoncé était en nette hausse par rapport à l’enveloppe de 181,4 millions de dollars générée au cours de la même période un an plus tôt. Ainsi, entre 2021 et 2023, les recettes de l'export de produits textiles en Éthiopie pourraient augmenter de l'ordre de 38 % de millions de dollars et de près de 72 % depuis 2019. Cela signifie que les prix dérisoires pratiqués par les fabricants du pays continuent d'attirer de nouvelles marques, qui ne changent pas leurs pratiques pourtant dysfonctionnelles et continuent de faire fabriquer leurs produits textiles dans des pays proposant des tarifs toujours plus bas.

En 2023, l'ONG Public Eye a révélé que les employés chinois de la marque Shein travaillent 11 à 12 heures par jour soit 75 heures par semaine avec un jour de congé par mois.2,48 €, c'est ce que reçoit l'ensemble des travailleurs sur l'ensemble de la chaine de production d'un pull de la marque Zara alors qu'elle le vend en moyenne aux consommateurs 31 €. Pourtant, pour que les personnes impliquées dans la production en Turquie et en Inde puissent vivre de leur salaire, celui-ci devrait, en fonction de l'étape de la production, être multiplié par un facteur de 1,9 à 3.

Des esclaves dans les champs de coton en Chine, des morts dans les usines de l'industrie textile au Bangladesh

500 000 chinois Ouïgours sont esclaves dans les champs de coton chinois notamment dans le Xinjiang soit l'équivalent de la population résidant à Lyon. 1130 bangladais sont morts suite à l'effondrement de l'usine du Rana Plaza en 2013. Selon l'étude "La mode sans dessus dessous" réalisée et éditée en 2018 par l'ADEME, l'Agence de la transition écologique ("Le revers de mon look", "Comment réduire l'impact de son look ?"), 579 travailleurs sont morts dans des incendies d’usines au Bangladesh entre 2009 et 2013.
"En 2017, une employée bangladaise affirmait qu'elle et ses collègues doivent fabriquer, par personne, entre 120 et 150 pièces à l'heure toutes les heures, quatorze heures par jour et que lorsqu'elles n'atteignent pas leurs objectifs horaires, elles sont insultées, humiliées en public ou moins payées." 
En 2017, lors d'une interview avec une journaliste du média Slate.fr une employée bangladaise affirmait qu'elle et ses collègues doivent fabriquer, par personne, entre 120 et 150 pièces à l'heure toutes les heures, quatorze heures par jour et que lorsqu'elles n'atteignent pas leurs objectifs horaires, elles sont insultées, humiliées en public ou moins payées. Elle a aussi confié que certains contremaîtres, lorsqu'ils approchent les ouvrières pour les motiver à atteindre les objectifs, les touchent de façon inappropriée.
 

Des maladies incurables et mortelles imputables aux produits chimiques toxiques utilisés dans les procédés de fabrication et de culture de l'industrie de la mode

Le délavage des jeans obtenu par sablage provoque de graves maladies chez les travailleurs comme la silicose, une maladie incurable et mortelle. Le tannage du cuir minéral ou au chrome est le plus rapide et le plus utilisé : 85 % des peaux dans le monde sont tannées via ce procédé. Pourtant, celui-ci génère du chrome VI, une substance qui provoque des réactions allergiques chez les personnes portant des chaussures en contenant et est classé cancérigène, notamment par inhalation et donc pour ceux qui travaillent le cuir. Le tannage du cuir minéral ou au chrome est également très polluant : les déchets et eaux usées sont souvent rejetés dans les rivières et champs environnants les tanneries qui ne sont pas situées au sein de l'Union Européenne (les tanneries situées au sein de l'UE sont assujetties à la Directive Cadre sur l’eau et classées IPCE, Installations Contrôlées pour la Protection de l’Environnement. Il s’agit d’un cadre strict pour prévenir et réduire les pollutions en milieu aquatique, veiller à un rigoureux traitement des eaux usées et à la réduction ou la suppression des rejets de certaines substances dangereuses). Ces rejets polluent ainsi l'eau, les sols et empoisonnent aussi les populations locales. Selon le site spécialisé WeDressFair.fr, l'ONG Blacksmith Institute, estimait en 2012 que les tanneries font partie des dix industries les plus toxiques au monde.
"Le nombre de cas de cancers dans le Pendjab, une région de l'Inde où est cultivé le coton, est passé de plus de 800 000 nouveaux cas en 2001 à 1 220 000 en 2016 soit 52,5 % d'augmentation des cas de cancer en 15 ans"

Le coton est la principale culture consommatrice de pesticides au monde, avec des impacts majeurs sur l'environnement et les populations locales. Selon une étude scientifique datant de 2016 et relayée par France 2 en 2018, le nombre de cas de cancers dans le Pendjab, une région de l'Inde où est cultivé le coton, est passé de plus de 800 000 nouveaux cas en 2001 à 1 220 000 cas en 2016, soit une augmentation de 52,5 % des cas de cancer dans la région. Plusieurs équipes de chercheurs à travers le monde ont expliqué cette augmentation par les métaux lourds, présents dans les pesticides notamment, responsables également de l'augmentation de l'autisme chez les enfants en Inde. Dans le pays, la production de coton biologique ne représentait, en 2018, que 1 % des cultures. Au cours du même reportage, France 2 révèle également le cas d'un petit garçon, fils d'agriculteur cultivant du coton en Inde et qui est alors en attente d'une greffe de foie. Ses parents n'auront pas les moyens de payer l'opération. Il est tragiquement destiné à une mort prochaine très probablement imputable aux pesticides utilisés dans les champs à proximité desquels il vit et dans lesquels il aide son père.

"Aujourd'hui, en Inde, les usines de fabrication de viscose ne font pas exception et génèrent de nombreuses maladies chez les travailleurs et les populations exposées aux rejets des usines : maladies des yeux, perte de la fertilité, problèmes vasculaires cardiaques et cérébraux, paralysie, perte de la parole et problèmes aux articulations."
En 2019, le documentaire "Fast Fashion, les dessous de la mode à bas prix" a révélé que le procédé de fabrication de la viscose est très toxique. Ainsi, pour fabriquer la cellulose, qui donnera le fil de viscose, la pâte à bois est plongée dans un bain d'acide sulfurique et de CS2. Quand la cellulose entre en contact avec l'acide sulfurique, le CS2 s'évapore dans l'atelier où les ouvriers travaillent, se répandant dans l'air. Au début du 20ème siècle, l'Europe s'était la première lancée dans la production de viscose, ce qui avait produit déjà à l'époque de graves maladies chez les travailleurs exposés au CS2 : excitabilité, hallucinations, atteignant ainsi 1/10 ème à 1/3 de la population. Aujourd'hui, en Inde, les usines de fabrication de viscose ne font pas exception et génèrent de nombreuses maladies chez les travailleurs et les populations exposées aux rejets des usines : maladies des yeux, perte de la fertilité, problèmes vasculaires cardiaques et cérébraux, paralysie, perte de la parole et problèmes aux articulations. Ainsi, le documentaire révèle, par le biais d'un médecin qui a répertorié, sur place, les maladies dont l'origine est le CS2, que des maladies des yeux, une perte de la fertilité, des problèmes vasculaires (au niveau du coeur et du cerveau) chez les travailleurs seraient la conséquence d'une exposition au CS2. La population locale est également touchée par le procédé de fabrication toxique de la viscose via les déchets de l'usine, déversés dans la rivière et donc la pollution de l'eau. Les enfants, les hommes et les femmes habitants proche des sites de production développent alors aussi des maladies telles qu'une paralysie, la perte de la parole, des problèmes aux articulations.

Guerre, travail des enfants et conditions de travail extrêmes restent au coeur des préoccupations de l'industrie bijoutière

En 2020, le média Ouest France titrait "Morts, mineurs surexploités, catastrophe écologique : le jade, pierre maudite en Birmanie" après la mort, en juillet 2020, d'une centaine de personne dans une mine de jade en Birmanie. Toujours selon des propos avancés par le Ouest France en 2020, en mars 2019, un rapport de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en Birmanie, estimait à 400 000 le nombre de travailleurs illégaux officiant dans les mines de jade. Il est également précisé, dans le même article, que l’exploitation des mines de jade, et ces lucratives recettes, sont au cœur de la guerre civile qui agite la Birmanie depuis plusieurs décennies. Ces mines aident à financer aussi bien les insurgés de l’Armée pour l’indépendance kachin (KIA) que les militaires birmans. Le Ouest France cite aussi l’ONG Global Witness, qui déplore que le commerce de la pierre de jade soit contrôlé par les élites militaires, les barons locaux de la drogue et les sociétés de copinage du gouvernement. Et que, ces réseaux génèrent d’énormes profits tandis que les populations locales subissent de terribles abus et ne toucheront jamais les près de 27,5 milliards d’euros de jade exportés en 2014 par exemple.En 2012, l'UNICEF avance le nombre de 700 000 enfants de 5 à 18 ans qui travaillent 10 heures par jour dans quelques 700 mines d’or au Burkina Faso, victimes des "pires formes" de travail, exposés aux maladies et à des abus sexuels. Selon l'OIT, l'Organisation Internationale du Travail, environ 1 million d’enfants travaillent dans les mines et leur nombre ne cesse d’augmenter. L'organisation précise aussi que les enfants descendent sous terre dans des tunnels à peine plus large que leur corps, transportent des charges de charbon plus lourdes que leur propre poids, sont exposés de longues heures au soleil à concasser des blocs de pierres en gravier pour en faire des routes, utilisent du mercure toxique à mains nues pour extraire l’or des pierres et pataugent à longueur de journée dans l’eau à tamiser le sable pour trouver des pierres précieuses. En 2020, l'ONG Swissaid affirmait, après avoir mené une enquête d'envergure, que le plus grand raffineur Suisse importerait, via Dubaï, de grandes quantités d'or provenant de mines issues de zones de guerres ou employant des enfants
"Selon l'OIT, l'Organisation Internationale du Travail, 170 millions d'enfants travaillent encore à ce jour dans le monde, dont la majorité d'entre-eux travaillent dans l'industrie de la mode, soit l'équivalent de onze fois l'ensemble des enfants et adolescents français de 0 à 19 ans en 2023."
Selon l'UNICEF, dans le monde, 112 millions d'enfants travaillent dans le secteur de l'agriculture, 31,4 millions d'enfants travaillent dans le secteur des services et 16,5 millions d'enfants travaillent dans l'industrie. Selon l'OIT, 170 millions d'enfants travaillent encore à ce jour dans le monde, soit l'équivalent de onze fois l'ensemble des enfants et adolescents français de 0 à 19 ans en 2023 et la majorité d'entre-eux travaillent dans l'industrie de la mode.

Les solutions proposées par la mode écoresponsable pour lutter contre les très mauvaises conditions de travail des travailleurs et travailleuses de l'industrie textile et bijoutière, ainsi que le travail des enfants

Acheter des vêtements fabriqués en France, au sein de l'Union Européenne, du Royaume-Uni et de l'Espace Schengen dont les salaires et les conditions de travail sont similaires aux nôtres et lorsque les marques révèlent le nom de leurs prestataires (afin d'éviter des ateliers clandestins ou sweatshops - bien que plus rares dans ces pays - dont les conditions de travail et de rémunération seraient équivalentes à celles des pays sous-développés ou en voie de développement par exemple). Choisir du coton bio certifié GOTS, label qui assure que l'ensemble des employés sont bien traités, tout au long de la chaine de fabrication de la fibre (de la récolte au tissage) et qui interdit le travail des enfants dans la culture comme dans l'industrie. Choisir des jeans délavés avec des techniques de délavage à l’ozone, laser, à la lumière ou aux enzymes, non toxiques pour les travailleurs. Acheter du cuir tanné végétal issu de tanneries situées au sein de l'Union Européenne. Consommer du cuir recyclé tanné végétal ou upcyclé (réutilisé sans avoir été broyé puis reconstitué) issus de tanneries situées au sein de l'Union Européenne. Acheter des bijoux fabriqués au sein de l’Union Européenne, de l’espace Schengen et du Royaume-Uni, dans des matériaux tels que l’or recyclé, l’argent recyclé, le plaqué or, l’or, l’argent, les MGP (rhodium, iridium, ruthénium, palladium), le diamant, les pierres précieuses colorées (rubis, saphirs et émeraudes) certifiés Responsible Jewellery Council (RJC), dans des matériaux tels que le laiton (composé de cuivre et de zinc uniquement) provenant de l’UE, dans des matériaux tels que le plaqué or, l’or, l’argent et le platine certifiés FAIRMINDED, dans des matériaux tels que végétaux, le bois certifié FSC, les cristaux de verre fabriqués au sein de l’UE, l’espace Schengen et le Royaume-Uni.

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